Le design de service est une méthodologie qui met le voyageur au cœur du processus de conception des services de mobilité. Adopter cette méthode innovante, c’est sortir d’un ancrage d’expert pour être au plus près des attentes et des besoins des usagers. Comment cette méthode enrichit-elle l’expérience des voyageurs ? Que peut-elle apporter à la mobilité de demain ? Éléments de réponse avec Michael Hayman, directeur de la practice innovation et design de Kisio !
Pourquoi parle-t-on de design de service ?
Michael Hayman : En français, on peut traduire « design » par « dessein », c’est-à-dire le sens, la signification, la finalité du produit ou du service qui va être conçu. On peut aussi le traduire par « dessin » : la formalisation d’une idée pour la rendre tangible. Le design de service est ainsi une méthodologie qui se fonde sur l’expérience utilisateur pour déterminer la forme que vont prendre de nouveaux services, et leurs fonctionnalités.
Quelle plus-value apporte le fait de « penser design » aux services de mobilité ?
L’objectif est de rendre les services de mobilité plus utiles, efficaces, fonctionnels. En un mot : plus désirables. Cet aspect est essentiel pour que la mobilité partagée soit choisie et non subie. Le design de service prend en compte l’ensemble des utilisateurs. Du côté des usagers, il se concentre sur la pertinence, la fluidité et la facilité d’utilisation des services de mobilité. Pour les agents et les exploitants, le design de service contribue à gagner en performance et se différencier face à la concurrence. Sa plus-value provient de son approche transversale, centrée sur le terrain et les conditions d’usage. Par ses compétences, le designer favorise le dialogue entre les parties prenantes. Il fait appel à l’intelligence collective pour développer des services innovants et pertinents.
Comment démarre-t-on une démarche de design de service en matière de mobilité ?
Identifier et formuler la problématique est la première étape du travail. Elle est indispensable car sinon, on risque de trouver la bonne solution au mauvais problème ! Chez Kisio, nous nous appuyons sur des équipes pluridisciplinaires qui réunissent des designers, des experts de la mobilité et des professionnels issus des sciences sociales et politiques. Nous menons une première phase d’étude des comportements et d’analyse de l’écosystème d’acteurs. À partir de ces données, nous reformulons le problème initial puis nous déterminons des défis de conception. Ensuite, nous entrons dans une phase de conception innovante pour trouver des solutions.
Comment se déroule la phase de conception d’un nouveau service de mobilité ?
Tout dépend de l’ampleur de la tâche et de la problématique identifiée ! Le processus créatif vise à faire émerger des solutions innovantes. Nous menons des ateliers d’intelligence collective de formats variés, de l’atelier de deux heures au sprint d’une semaine, selon les objectifs et l’envergure du projet. Nous entrons ensuite dans une phase de conception plus technique avec la définition des modalités opérationnelles, du modèle économique, du projet de service ou des outils digitaux associés au service. Une fois cette étape terminée, nous procédons à des expérimentations.
Pourquoi avoir recours à des expérimentations ?
Une démarche de design de service se nourrit de tests et d’apprentissages avec un objectif d’amélioration continue. Expérimenter, c’est tester l’intérêt du service pour les usagers, vérifier sa faisabilité technique et sa viabilité économique. C’est passer du concept à la réalité. En cela, le design de service contribue à mieux gérer les risques. Les expérimentations sont de durée et d’intensité différentes, du démonstrateur rapide au projet pilote de grande envergure. Chez Kisio, par exemple, nous avons mis en place avec nos partenaires Praxie Design, en co-construction avec SNCF Gares&Connexions, un démonstrateur afin de tester des services visant à favoriser l’interface train/mobilités actives. Cette expérience, d’une durée de deux jours, s’est récemment déroulée dans la gare de Pontcharra-sur-Bréda (38). Nous avons aussi accompagné la Direction Technologies, Innovation & Projets Groupe SNCF sur une plus longue durée (18 mois) pour tester le service Ma Course SNCF, une solution de transport à la demande en zone rurale. L’objectif de ces démarches est de générer un maximum de valeur et d’apprentissage pour toutes les parties prenantes. D’ailleurs, j’ai l’habitude de dire qu’une expérimentation ratée, c’est une expérimentation dans laquelle on n’apprend rien.
Après l’expérimentation, comment passe-t-on à plus grande échelle ?
L’objectif de la démarche est d’aboutir à une solution viable aussi bien d’un point de vue technique qu’économique. Après le ou les tests, nous fournissons à nos clients des kits de généralisation pour déployer le service sous une forme industrielle là où ils le souhaitent.